Idée de sortie: exposition Fela Anikulapo Kuti, rébellion afrobeat

Entre musique afrobeat et militantisme panafricain, découvrez jusqu’au 11 juin à la Philharmonie de Paris l’exposition sur la vie d’une superstar africaine assez peu connue en France aujourd’hui. 

L’exposition permet de retracer les différentes étapes majeures de sa carrière en tant qu’artiste et activiste politique. Elle commence notamment par le début de sa carrière entre Lagos, sa ville de naissance, aussi capitale économique du Nigéria, et les Etats-Unis, qui ont influencé la création d’un style musical bien particulier, l’Afrobeat. Ce style musical né à la fin des années 1960 au Nigéria, mélange jazz, soul, funk (des Etats-Unis), musique traditionnelle yoruba (ethnie de Fela Kuti) et d’autres sonorités ouest-africaines, un style que Fela a créé et qui a révolutionné la musique en Afrique.

Par ailleurs, l’espace de l’exposition permet d’apprécier les différentes prestations scéniques marquantes de l’artiste ainsi que ses costumes de scène, qui nous donnent une idée de la ferveur musicale des années 1970 et 1980 à Lagos. Des prestations faites aussi bien à Lagos au Afrika Shrine, à la fois club et quartier général de l’artiste), qu’à Londres ou à Paris qui témoignent de l’impact musical et de la renommée de Fela à cette époque. 

Cet impact musical est particulièrement lié à l’engagement politique de Fela qu’on retrouve dans les textes de ses chansons. En effet, l’exposition regorge d’affiches, de photographies et d’archives qui mettent en avant les valeurs panafricaine et anticolonialiste de l’artiste. L’exposition permet aussi de mieux comprendre le contexte politique du Nigéria et du continent à l’époque, puisque l’artiste critiquait vivement les gouvernements successifs nigérians corrompus, ce qui lui aura valu d’être emprisonné et attaqué plusieurs fois, ainsi que les attitudes néocoloniales de l’Europe en Afrique, d’où l’importance pour lui d’un panafricanisme qui fédère les Africains. 

Enfin, la place importante des femmes dans cette exposition est un choix intéressant fait par les curateurs. En effet, Fela n’était pas connu pour son engagement féministe ou pour un réel intérêt dans le respect des droits de la femme mais l’exposition montre le lien évident entre son engagement politique et l’influence de sa mère, Funmilayo Ransome-Kuti, une pionnière dans le combat féministe et anticolonialiste au Nigéria pendant la période coloniale britannique. De plus, les femmes de sa troupe, les ‘Kalakuta Queens’, qui l’accompagnaient dans ses tournées en tant que chanteuses et danseuses sont aussi mises en valeur et sortent de l’anonymat. 

Il est donc évident que cette exposition pourra attirer les amateurs de musique et/ou de cultures africaines, par la mise en valeur qu’elle fait d’un artiste aux multiples facettes qui a considérablement influencé les artistes africains et en particulier les artistes nigérians actuels. 

William Marthet

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[Portraits de personnalités inspirantes : Hom Nguyen]

Cette semaine, arrêtons-nous quelques instants sur un artiste franco-vietnamien à filiation expressionniste, Hom Nguyen. Travaillant dans son atelier dans le 93, il vit à Paris depuis sa naissance. Pourquoi est-il une source d’inspiration ? Car il a connu des échecs, des décès de personnes chères, le racisme et la pauvreté. Malgré tout, il est aujourd’hui un artiste reconnu, mettant son talent et son art au service des plus démunis. 

Hom Nguyen est né en France d’une mère immigrée vietnamienne et d’un père parisien inconnu. Il vivait avec elle et son nouveau compagnon, ami d’enfance, dans un appartement de 13m² dans le 15e arrondissement. Arrivée en France sans parler la langue, assistante de coiffure à Paris, elle fut victime d’un accident de voiture quand Hom n’avait encore que 4 ans. Vinrent alors des problèmes financiers de plus grande ampleur. 

Dans sa vie, il a connu le racisme anti-asiatique des années 1970-1980. Confronté à la mort de son père adoptif durant son adolescence, il devient à 16 ans le soutien de SA famille. 

Il débuta alors de nombreux petits boulots pour subvenir aux besoins de sa mère, et eut un déclic. Il devait se remettre au dessin et à la peinture. Cependant, sa mère était contre, et ce n’est après sa mort, en 2009, qu’Hom décida de se lancer sans jamais regarder en arrière. Comme il le dit lui même « J’ai appris à marcher tout droit, à raser les murs la tête baissée pour m’en sortir. Là, j’ai fait pareil. J’ai juste fait en sorte de m’en sortir ». 

Pour se faire connaître, il a utilisé les réseaux sociaux. Il n’a d’ailleurs pas commencé par de grandes toiles, mais par des dessins sur des chaussures. Il peignait déjà quand il était enfant, sûrement influencé par son père adoptif, amateur de théâtre vietnamien. Les aléas de la vie lui ont fait oublier son amour de jeunesse. 

Ses œuvres sont imprégnées de son histoire personnelle. Toute sa vie fut noire, c’est une mémoire qui reste, forcément. Pourtant, la couleur apparaît dans ses œuvres. La douceur colorée mais la violence des regards. Sont racontés aussi le voyage de sa mère, catégorisée comme « boat people », et la mémoire, qui se transmet par les gestes, par la main. On retrouve aussi la méconnaissance de son père biologique qui a créé un fil conducteur tout au long de son existence et de son art, un trait sans origine ni fin. 

Artiste peintre, son style et vif et très instinctif, sa liberté gestuelle dans la technique le rapproche même parfois du street art.

Hom Nguyen s’est également engagé depuis 2016 à animer des ateliers de dessin à la Pitié Salpêtrière. Son objectif était de partager son expérience pour aider les jeunes adultes à avoir de nouveau confiance en eux. Évoquant son enfance qui ne fut pas des plus joyeuses, il explique que la peinture lui a permis de s’évader. C’est cela qu’il veut faire découvrir aux patients de l’hôpital.

Mais il ne s’arrête pas là. En 2019, son portrait de Michelle Obama, acheté par Christie’s, a permis une formidable récolte de fonds afin de soutenir les programmes en faveur de l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, menés par UN Women. 

En 2020, il réalisa une vente aux enchères record avec une œuvre vendue à près de 224 000 euros, dont les bénéfices ont été reversés à l’ONG Les enfants du Mekong. Cela a permis à 750 enfants d’être nourris et de recevoir des cours complémentaires pendant un an, notamment des cours de dessin. De la sorte, Hom Nguyen a pour objectif de motiver d’autres artistes et créer un élan de générosité dans le milieu de l’art. En effet, depuis quelques années, les ONG souffrent d’une baisse de dons. Ces actions sont donc très importantes pour leur permettre de continuer leurs activités. 

Enfin, durant l’épidémie de Coronavirus, l’artiste s’est engagé pour la cause des personnes défavorisées, a réalisé un portrait de l’Abbé Pierre et en a fait don à la fondation éponyme. 

Sources : Youtube, Hom Nguyen

Cet article n’engage que son auteure.

Tifenn Genestier

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