[Le Patrimoine naturel de l’UNESCO : le parc national du Vatnajökull]

Créé en 2008, le parc national du Vatnajökull est une région volcanique emblématique de l’Islande, qui couvre 14% de l’île. Ce bien de 1 482 000 ha, dont 85% est classé comme une zone de nature sauvage, est le plus grand parc national d’Europe.

Le bien est traversé par la zone volcanique orientale et la zone volcanique septentrionale, deux zones de rift qui compensent le l’écartement des plaques tectoniques, de 19 mm chaque année. On compte en effet dix volcans dans le parc, dont huit sont sous la glace et sont parmi les plus actifs d’Islande. Lorsque ces derniers interagissent lors d’une éruption avec les fissures de la calotte glaciaire du Vatnajökull (qui recouvre environ 780 000 ha), la rupture de la marge du glacier provoque une inondation : le Jökulhlaup. Apparaissent alors des plaines de sable, des réseaux fluviaux et des canyons, phénomène unique au monde.

Dettifoss sous la neige fin avril.

En dehors de la calotte glaciaire, on retrouve logiquement des champs de lave, mais aussi des montagnes et des roches volcaniques formées lors des éruptions fissurales (hyaloclastites). C’est de ce phénomène qu’est née l’expression attribuée au parc, “la nature dynamique du feu et de la glace”. Ce système a permis la création de reliefs dynamiques et variés sur le plan géologique, qui sont actuellement sous-représentés ou absents de la Liste du patrimoine mondial, d’où l’importance du parc. 

La protection de ce bien est plus que jamais d’actualité : si la calotte glaciaire du Vatnajökull a atteint sa plus grande extension à la fin du XVIIIe siècle, elle est aujourd’hui menacée par le réchauffement climatique mondial.

Si le parc abrite de nombreuses espèces (rennes, phoques, plantes vasculaires…), il faut savoir que ces zones volcaniques abritent également une faune propre aux eaux souterraines, qui a survécu à la période glaciaire. On retrouve également des organismes unicellulaires dans ce milieu inhospitalier qui reproduirait les conditions de la Terre à ses débuts, ainsi que des satellites de glace de Jupiter et Saturne.

Le Hvannadalshnjúkur, plus haut sommet d’Islande situé au sud de la calotte du Vatnajökull.

Critères de sélection :

Le parc national du Vatnajökull a été inscrit sur la Liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO en 2019, sur un critère.

Critère (viii) : “être des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l’histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d’éléments géo-morphiques ou physiographiques ayant une grande signification”

En effet, la coexistence d’un rift océanique actif émergé, d’une remontée de roches chaudes et d’une calotte glaciaire de cette taille, est inédite et fait du parc un bien unique. Les paysages y sont variés et présentent des caractéristiques à la fois tectoniques, glacio-volcaniques et volcaniques. Ces dernières ont d’ailleurs servi de comparatifs pour étudier la planète Mars. Les caractéristiques du bien étant facile d’accès, elles font l’objet d’un intérêt scientifique important : pas moins de 281 articles scientifiques ont été publiés sur le parc ces dix dernières années. 

Paysage montagneux des hauteurs de Kjós, près de Skaftafell.

Gestion du site :

Dans la mesure où le site est classé zone de nature sauvage, il n’y a pas eu de développement humain destructif dans les limites du bien : seuls quelques employés du parc y vivent à l’année.

La plus grande partie du bien est protégée par la Loi sur le Parc national du Vatnajökull. Plusieurs autres lois nationales importantes sont en vigueur pour assurer sa protection. L’agence gouvernementale du Parc national du Vatnajökull, principale responsable de l’application de la législation sur le parc, est soutenue par le Gouvernement de l’Islande, les municipalités locales et les entreprises. Les zones ajoutées au parc national depuis 2013 sont progressivement intégrées dans les dispositions de gestion. 

Le budget du parc, dont 30% provient de ses recettes, est principalement financé par le gouvernement central. Le Fonds de protection des sites touristiques et l’organisation à but non lucratif des Amis du Vatnajökull participent également à son financement.

Enfin, la gestion du parc s’avère difficile dans la mesure où il s’agit d’une zone où les risques naturels sont communs. Il faut en outre protéger le site de l’usure, empêcher les activités illégales et contrôler le flux de visiteurs, qui ne cesse de croître chaque année.

La fissure volcanique d’Eldgjá.

Sources : Parc national du Vatnajökull, Parc national du Vatnajökull – la nature dynamique du feu et de la glace

Cet article n’engage que son auteure.

Mathilde VARBOKI

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[ Le patrimoine mondial naturel de l’UNESCO: Les Sundarbans – Bangladesh]

Le site naturel des Sundarbans, situé au sud-ouest du Bangladesh, est l’une des plus grandes forêts de mangroves au monde. La mangrove est une formation forestière littorale tropicale, à base de palétuviers, ne se développant que dans la zone de balancement des marées, appelée estran, des côtes basses des régions tropicales.  

Le bien, classé patrimoine mondial depuis 1997, s’étend sur 140 000 hectares et couvre le “delta du Gange, du Brahmapoutre et de la Meghna, dans la baie du Bengale ». 60% de la superficie du bien se situe au Bangladesh, l’autre se trouvant en Inde.

Le site abrite une riche biodiversité mondialement reconnue avec sa flore particulière et sa faune exceptionnelle : des tigres du Bengale, des espèces menacées à l’image du crocodile marin, ou encore 260 espèces d’oiseaux. Il présente de nombreux habitats « terrestre, aquatique et marin pour des espèces de faune et de flore de toutes tailles ». Il est également considéré comme une zone de reproduction de multiples espèces en voie de disparition. Le bien est constitué de terres immergées ainsi que de zones maritimes avec de nombreuses voies d’eau. Le site a aussi une dimension hautement symbolique : il est, selon l’UNESCO, « l’un des hauts lieux du patrimoine mythologique et historique » de la région.

Critères de sélection : 

Les Sundarbans ont été sélectionnés sur la base des critères de sélection IX et X : 

Pour en savoir plus sur les critères de sélection : https://whc.unesco.org/fr/criteres/  

Critère IX : « être des exemples éminemment représentatifs de processus écologiques et biologiques en cours dans l’évolution et le développement des écosystèmes et communautés de plantes et d’animaux terrestres, aquatiques, côtiers et marins ». 

Le site est représentatif de processus écologiques en tant que témoin de la « formation d’un delta et de la colonisation subséquente des îles du delta ». Les éléments marqueurs de ces processus sont : les pluies de mousson, les inondations, la formation de deltas, l’influence des marées ou encore la colonisation végétale. Les terres et ilots ont une forme très particulière car ils ont été façonnés par l’action des marées du delta. Ils sont donc les marqueurs de ce processus écologique. 

Critère X : « contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation ». 

Les Sundarbans abritent une abondante biodiversité marine et terrestre tant floristique que faunistique. Le site accueille par exemple des espèces en voie d’extinction comme les dauphins du Gange et de l’Irrawaddy ou les tortues fluviales de l’Inde (Batagur baska). 334 espèces de plantes s’y trouvent. La protection de ce bien classé au patrimoine mondial de l’UNESCO est donc primordiale puisqu’il permet la conservation in situ de nombreuses espèces et la pérennité de l’une des plus grandes forêts de mangroves au monde.

Les Sundarbans, – image libre de droits.

Gestion du site : 

Le site classé fait face à des pressions et menaces extérieures de taille tant naturelles (comme les cyclones, les raz-de-marée ou l’envasement) qu’humaines avec la surexploitation des ressources animales et sylvicoles (foret), le braconnage ou encore le défrichement en faveur d’une activité agricole. 

Une protection juridique a été mise en place au niveau national depuis le début du 19ème siècle, qui bénéficiait au site actuel inscrit sur la liste de l’UNESCO. Ses environnements terrestres, forestiers et aquatiques étaient donc déjà en partie protégés. Le site était préservé grâce à des réserves forestières créées en 1878 puis avec ses trois sanctuaires de faune et de flore sauvages, qui ont été créés en 1977.  Selon l’UNESCO, aujourd’hui, « l’objectif principal de la gestion est la conservation de la biodiversité, des valeurs esthétiques et de l’intégrité. » Le bien est « actuellement bien géré et régulièrement suivi selon des normes de gestion bien établies par un personnel régulier et des unités administratives ». 

La conservation du site est nécessaire car il s’agit d’une zone essentielle pour des millions d’habitants riverains du site : absorption de la force des raz-de-marrée, protection face aux cyclones et inondations. Il constitue également un moyen de subsistance pour de nombreuses populations aux activités diverses : « coupeurs de bois, pêcheurs, collecteurs de miel et ramasseurs de feuilles et d’herbe ».

Pour en savoir plus : https://whc.unesco.org/fr/list/798 

Cet article n’engage que son auteure.

Agathe Passerat de La Chapelle

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[Actualité de l’UNESCO: La baguette en lice pour entrer au patrimoine mondial de l’UNESCO]

La baguette de pain est candidate à l’inscription au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. La décision finale sera prononcée en 2022. 

Être inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO nécessite d’être porté par un groupe de personnes. Dès septembre 2018, la confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française avait formulé son souhait de voir la baguette de pain être inscrite au Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. Les savoir-faire artisanaux et la culture de la baguette de pain sont déjà inscrits à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France depuis le 23 novembre 2018. 

La baguette, bien que présente dans de nombreux autres pays, est devenue un véritable symbole de la France et de sa culture dans le monde. Une baguette standard est large d’environ 4 à 6 cm, haute d’environ 3 à 5 cm et longue d’environ 65 cm. Elle pèse environ 250 g. Un concours national de baguette tradition française a lieu tous les ans en France, organisé par la Confédération Nationale de la Boulangerie et Boulangerie-pâtisserie française. 

La ministre de la culture Roselyne Bachelot s’est exprimée sur son choix de porter la baguette à l’UNESCO : « Si cette candidature nationale était couronnée de succès devant l’Unesco, l’inscription de cet élément permettra de faire prendre conscience qu’une pratique alimentaire faisant partie du quotidien, partagée par le plus grand nombre et allant de soi, constitue un patrimoine à part entière ». Inscrire la baguette au patrimoine mondial de l’UNESCO permettrait vraiment de mettre en lumière le travail artisanal des boulangers, dont le nombre est en baisse en France depuis quelques années. C’est ce qu’a souligné Dominique Anract, président de la Confédération Nationale de la Boulangerie et Boulangerie-pâtisserie française : 

 « Après quatre ans de travail, c’est une grande fierté que notre dossier ait été choisi par la France. (…) Cela valorise notre savoir-faire et cela peut inciter des jeunes à choisir le métier ».  Rendez-vous en 2022 pour le verdict !

Cet article n’engage que son auteur.e

Charlotte Morel

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[Le patrimoine mondial naturel de l’UNESCO: les îles Phoenix]

Pour le premier avril, nous vous proposons de découvrir une nouvelle zone maritime protégée, réputée pour les poissons qu’elle contient : l’aire protégée des îles Phoenix. 

Si la grande barrière de corail est la plus célèbre zone maritime protégée du globe, l’aire protégé des îles Phoenix est quant à elle « la plus grande zone maritime protégée au monde ». Recouvrant 408 250 km², elle se compose de huit îles, de récifs submergés et des eaux environnantes, ce qui correspond à 12% du territoire kiribatien, dans l’Océan Pacifique sud.

Crée en 2006 dans l’espoir d’encourager la communauté internationale à protéger l’environnement, l’aire des îles Phoenix a été inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2010.

L’aire protégée des îles Phoenix est interdite à toute exploitation de ses ressources, ce qui lui a permis de conserver « un des derniers écosystèmes intacts d’archipel corallien océanique de la planète ». En effet, on y retrouve 200 espèces de coraux, 500 espèces de poissons, 18 espèces de mammifères marins et 44 espèces d’oiseaux : poissons requins, tortues de mer, crabes de cocotier… 

Le site contient également 14 monts sous-marins, qu’on suppose être des volcans éteints. Ceux-ci font jusqu’à 4 500 mètres d’altitude et 6 000 mètres de profondeur.

Grâce à son isolement, l’aire des îles Phoenix est ainsi un site unique en terme de biogéographie, dans la mesure où il s’agit d’un habitant crucial pour les espèces migratoires et les courants océaniques de la région.

© Conservation.org

Critères de sélection : 

Pour figurer sur la Liste du patrimoine mondial, un site doit satisfaire à au moins un des dix critères de sélection. L’aire protégée des îles Phoenix en satisfait deux.

Critère (vii) : représenter des phénomènes naturels ou des aires d’une beauté naturelle et d’une importance esthétique exceptionnelles.

L’Aire protégée des îles Phoenix est une étendue sauvage inhospitalière à la colonisation humaine, minimisant ainsi l’impact des activités humaines. La nature quasiment vierge, la clarté des fonds marins, le spectacle des groupes d’espèces charismatiques, les récifs coralliens d’une beauté exceptionnelle et les concentrations d’oiseaux marins, font de ce bien un véritable kaléidoscope d’une beauté naturelle exceptionnelle, dont l’importance est planétaire.

Critère (ix) : être des exemples éminemment représentatifs de processus écologiques et biologiques en cours dans l’évolution et le développement des écosystèmes et communautés de plantes et d’animaux terrestres, aquatiques, côtiers et marins.

En tant que lieu de reproduction de nombreuses espèces terrestres et marines, et grâce au haut niveau de biodiversité qui lui est associé, l’aire protégée des îles Phoenix contribue fortement au développement des écosystèmes marins et des communautés végétales et animales de la planète. Ce bien est d’une importance scientifique majeure dans l’identification et le suivi des processus d’évolution du niveau de la mer, les taux de croissance et l’âge des récifs et des coraux constructeurs de récifs et dans l’évaluation des effets du changement climatique.

Gestion du site :

Sur le plan juridique, l’aire des îles Phoenix est protégé en vertu d’un règlement de 2008 qui définit clairement son périmètre, établit son comité de gestion et s’efforce de mettre en place d’un plan de gestion. Le gouvernement de Kiribati s’engage fermement à garantir un système de gestion durable et adapté aux conditions d’un petit État insulaire en développement, notamment en sanctionnant des bateaux de pêche illégale.

Kiribati s’engage à poursuivre le renforcement des capacités de gestion, notamment en matière de surveillance et de respect de la législation, à travers des partenariats régionaux, nationaux et locaux. Le gouvernement de Kiribati veille également à ce que l’interdiction de pêcher dans la région soit respectée.

Les partenaires, comme Conservation International et l’Aquarium de New England, s’engagent quant à eux à assurer la création, le financement global et le fonctionnement du fonds de soutien en faveur du bien. 

Cet article n’engage que son auteure.

Mathilde VARBOKI

Sources : https://fr.wikipedia.org/wiki/Aire_prot%C3%A9g%C3%A9e_des_%C3%AEles_Ph%C5%93nix, https://whc.unesco.org/fr/list/1325/

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[Chronique sur le patrimoine Unesco en France : le Bassin minier du Nord-Pas de Calais]

Le Bassin minier du Nord-Pas de Calais désigne un site de 120 000 hectares, classé en 2012 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Il regroupe 109 biens individuels qui ont trait à l’histoire de l’extraction du charbon : des fosses (la plus vieille date de 1850), des infrastructures de transport de la houille, des gares ferroviaires, des corons… 

Le site donne à voir un paysage façonné, durant trois siècles (XVIIIe au XXe siècle), par l’extraction du charbon et tout ce qui y est associé, comme le note l’UNESCO : 

  • une architecture particulière et un urbanisme spécifique avec les corons ou les cités-jardins,     
  • l’histoire de l’Europe industrielle,
  • des « éléments physiques et géographiques » caractéristiques (terrils, terres agricoles…), 
  • des « vestiges des équipements de transports » (chemins de fer…)
  • du « patrimoine industriel minier » avec par exemple les bâtiments industriels résiduels 
  • ou encore des  « éléments monumentaux et architecturaux témoins de la vie sociale » (églises, châteaux des dirigeants, sièges sociaux des compagnies…). 

Le site illustre les conditions de vie difficiles des mineurs ainsi que la dangerosité du travail de la mine. Il témoigne également de «la diffusion des idéaux du syndicalisme ouvrier et du socialisme». 

Coron des 120 à Anzin et Valenciennes. Bassin minier du Nord-Pas de Calais (France); Auteur : Hubert Bouvet. Copyright : © Hubert Bouvet, Région Nord-Pas de Calais, 2012.

Lien durable: whc.unesco.org/fr/documents/117353

Le bien inscrit rassemble donc un patrimoine à la fois technique et paysager ainsi qu’un héritage social. Selon les termes de la Convention du patrimoine mondial, le site « présente un paysage culturel évolutif vivant exceptionnel par sa continuité et son homogénéité ».

Ce site s’inscrit dans un patrimoine bien particulier : le patrimoine industriel. Il s’agit d’un patrimoine récent (en France), qui a eu du mal à obtenir de la reconnaissance. Beaucoup de sites miniers ou industriels similaires ont été détruits. La fermeture des mines et usines a participé à produire de multiples friches, souvent rasées au profit d’une nouvelle utilisation. Ainsi, dans les années 1980, nombreux sont les témoignages de l’histoire minière à avoir disparu. L’exemple du centre thermal à Amnéville, celui du parc d’attraction Walygator Grand-Est (anciennement Big Bang Schtroumpf) à Hagondange en Lorraine, tous deux construits à la place d’anciens sites miniers ou encore l’aménagement d’une piste de ski synthétique sur un terril à Nœux-les-Mines dans le Nord-Pas-de-Calais, illustrent ce phénomène qui consiste à « gommer le passé » pour donner une autre fonction aux territoires. Il s’agit d’une stratégie du « tabula rasa» consistant à faire table rase du passé pour donner une nouvelle vie au territoire.

Ce n’est que récemment que la question de la patrimonialisation du paysage de friche industrielle s’est posée. Certains sites sont « devenus » patrimoine en tant que porteurs d’histoire. C’est la prise en compte d’un passé « accepté » qui est à l’origine du passage de cet héritage « encombrant » (friches immenses,  patrimoine industriel minier abandonné…)  vers un patrimoine « reconnu ». Le « territoire-mémoire », comme ces friches industrielles, est  au cœur des enjeux de patrimonialisation actuels en tant que témoignage d’une histoire minière et industrielle mais aussi sociale et collective. En effet, l’on était mineur de père en fils et l’ensemble de ces territoires, ainsi que de nombreuses générations étaient et restent marqués par cette ancienne quasi mono-industrie. 

Lewarde (Nord) Fosse Delloye, Centre Historique Minier. Bassin minier du Nord-Pas de Calais (France), Auteur : Hubert Bouvet

Date : 24/05/2011Copyright : © Hubert Bouvet, Région Nord-Pas de Calais; Lien durable: whc.unesco.org/fr/documents/176688

Pour en savoir plus : http://whc.unesco.org/fr/list/1360/ 

Cet article n’engage que son auteure !

Écrit par Agathe Passerat de La Chapelle

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[Le Patrimoine naturel de l’UNESCO: Le golfe de Porto]

Cette semaine, nous mettons à l’honneur un de nos magnifiques territoires français qui n’est autre que la Corse.

Avec ses traditions et son patrimoine unique, l’île de beauté charme depuis de nombreux siècles explorateurs et touristes venus de toutes parts, en restant à la fois préservée et en gardant de nombreux secrets.

© Léane YVOREL – Calanches de Piana

Au sud de l’île sur la façade occidentale, au nord d’Ajaccio, se trouve l’emblématique Golf de Porto, regroupant les calanches (calanques en corse) de Piana, le golfe de Girolata et la réserve naturelle de Scandola, partie intégrante du parc naturel régional de Corse.  

Ici, les reliefs ocres de roches plutoniques¹ contrastent avec le bleu perçant de la Méditerranée et le vert du maquis corse, offrant un tableau d’une rare beauté perdue entre ciel et terre. C’est un environnement rempli d’histoire qui s’offre à la vue des chanceux spectateurs arpentant les sentiers de randonnée, où chaque passage est réglementé. La route côtière se voit bordée de tours génoises, témoins du passé défensif de l’île. Les deux plus remarquables sont celle de Girolata et de Porto, édifiées en 1551 et 1552. 

On peut aussi apercevoir l’œuvre du temps et de l’érosion façonner à sa façon le paysage. Au fil des âges, ils ont forgé un cœur au sein de la pierre, fenêtre ouverte sur la mer. Pour reprendre les mots de Guy de Maupassant dans le monastère de Corbara (1880), “Je m’arrêtai d’abord stupéfait devant ces étonnants rochers de granit rose, hauts de quatre cents mètres, étranges, torturés, courbés, rongés par le temps, sanglants sous les derniers feux du crépuscule et prenant toutes les formes comme un peuple fantastique de contes féeriques, pétrifié par quelque pouvoir surnaturel […] les calanches de Piana sont une des merveilles de la Corse ; on peut dire, je crois, une des merveilles du monde”. 

¹roches magmatiques résultant du refroidissement et de la solidification de magma volcanique.

Le Cœur de Piana

La réserve de Scandola coupe elle aussi le souffle. Accessible uniquement par bateau, elle abrite une biodiversité marine et costale incroyable. D’une surface de 900 hectares terrestres et 1000 hectares marins, il n’est pas rare d’y apercevoir des dauphins ou des oiseaux de mer difficilement observables ailleurs comme le balbuzard pêcheur.  Dans son maquis on y trouve également 33 espèces florales endémiques.

Portes marines de Scandola

Le Golfe de Porto, avec ses secrets et ses légendes aura donc inspiré de nombreux contes et légendes, de nombreux récits et chants, traduits notamment par la paghjella, genre profane et religieux polyphonique corse, dont l’importance a également été reconnu par l’UNESCO comme Patrimoine Culturel Immatériel. Le Golfe de Girolata, petite partie de celui de Porto, est lui aussi reconnu pour son granit rose, et notamment sa belle falaise Punta Rosa creusée par la mer.

© Léane YVOREL – route de Piana 

Critères de sélection :

Le Golfe de Porto a obtenu la sacralisation de patrimoine mondial de l’UNESCO en 1983, sur trois des dix critères de sélection.

Critère (vii) 

“représenter des phénomènes naturels ou des aires d’une beauté naturelle et d’une importance esthétique exceptionnelles”

Rapprochons-nous des mots cités de Maupassant ci-dessus, visionnaire quant au futur des calanches de Piana. La beauté des sites du Golfe de Porto a été décrite par bon nombre d’artistes et personnalités au cours des siècles, tel que le Prince Roland de Bonaparte en 1891 dans son récit de voyage “une excursion en Corse”. Il dresse le portrait de la région du Golfe de Porto tel qu’il l’a vu, comme étant “sans aucun doute, une des plus belles de Corse”.

Critère (viii)

“être des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l’histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d’éléments géomorphiques ou physiographiques ayant une grande signification”

 Les roches magmatiques si particulières de la côte témoignent du passé volcanique de l’île. Leurs reliefs impressionnant en font un site d’une exception précieuse, tant pour la contemplation de chacun que pour la conservation et la recherche scientifique.

Critère (x)

“contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation”

La réserve de Scandola classée réserve naturelle, à la fois marine et terrestre, brille par sa biodiversité singulière. Classée site marin protégée en France en 1975, elle est soumise à de nombreuses réglementations strictes afin d’en protéger le patrimoine.  

Gestion des sites

Le littoral du golfe faisant partie du Parc Naturel Régional de Corse, les activités y sont très réglementées afin d’en préserver l’écosystème. Y sont interdits sur terre, l’arrachage de végétaux, ou la destruction de nids et d’œufs, la chasse, le camping, le rejet de détritus, et toute forme d’activité nuisible au bien-être des populations d’espèces de la côte. 

En mer, la pêche de plaisance, le prélèvement d’animaux ou végétaux marins sont entre autres interdits. En revanche, pour l’heure, seule la réserve de Scandola est classée AMP, Aire Marine Protégée, mais l’appellation pourrait s’étendre à tout le Golfe de Portu classé Natura 2000. 

Le réseau Natura 2000 est un ensemble de sites naturels et semi-naturels de l’Union Européenne, dont la biodiversité est jugée exceptionnelle.

© Léane YVOREL – Calanches de Piana

sources : Calanques de Piana — Wikipédia (wikipedia.org), Golfe de Porto : calanche de Piana, golfe de Girolata, réserve de Scandola – UNESCO World Heritage Centre

Cet article n’engage que son auteure.

Léane YVOREL

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[Chronique scientifique, le Patrimoine mondial naturel de l’UNESCO: L’Archipel de Socotra]

Un paysage de dragonniers © honzakrej / Adobe Stock

Voici celui que l’on nomme les « Galápagos de l’Océan Indien », en raison de sa biodiversité parmi les plus particulières et les plus riches de notre planète : l’Archipel de Socotra.

Présentation et histoire

Aussi appelé « l’île extraterrestre » au vu de sa singularité, l’archipel de Socotra est un ensemble d’îles appartenant au Yémen, situé à une centaine de kilomètres au large de l’Afrique de l’Est en mer d’Arabie entre la Somalie et le Yémen. S’étendant sur 250 kilomètres, il est composé de deux îlots rocheux baptisés Sabuniyah et Ka’l Firawn et de quatre îles, dont la plus remarquable est l’île de Socotra, aux côtés d’Abd al-Kuri, Darsah et Samha.

D’origine continentale, il se sépare du supercontinent Pangée, plus précisément du Gondwana, il y a un peu moins de 20 millions d’années (un battement de cils), et n’a depuis de cesse de fasciner les chercheurs par le trésor que constitue sa biocénose¹ unique et  cachotière.  En 1990, un groupe de scientifiques des Nations Unies se rend sur l’île afin d’en étudier l’écosystème. Le verdict est sans appel: c’est environ 700 espèces endémiques à cette région qui y sont découvertes, dont l’emblématique Dragonnier de Socotra. Un décor tiré d’un film de science-fiction qui fera se demander aux plus sceptiques s’ils n’ont pas changé de planète.

¹: ensemble des êtres vivants qui peuplent un même environnement.

Nature of the Socotra Archipelago, Yemen

Une autre expédition de taille a été menée en 2008 par un groupe d’archéologues russes, afin cette fois-ci de se pencher sur les mystères des civilisations de l’île. Beaucoup d’outils préhistoriques appelés “chopping tools” y ont été trouvés. 

Les chopping tools sont des outils façonnés dans la pierre, dont on obtient le tranchant en créant des éclats sur les deux faces (de l’anglais to chop /ˈtʃɒp/ : hacher). Ils sont caractéristiques des plus anciennes civilisations africaines de la période Oldowan. Ces petits outils nous révèlent donc que les premiers hommes ayant foulé la terre secrète de Socotra l’auraient fait il n’y a pas moins d’1,7 millions d’années… 

Aujourd’hui, c’est à peu près 50 000 habitants qui vivent au sein de l’archipel, dont la ville majeure est Hadiboh sur l’île de Socotra. Il n’y a aucun résident permanent sur les trois autres îles. 

La mémoire de l’île est ancrée dans une tradition poétique ancestrale. Chaque année, un concours de poésie y est organisé par la population socotrane. Le premier artiste reconnu fut une femme au 9ème siècle, la poétesse Fatima Al-Suqutriyya, surnommée Al-Zahra (la brillante). Aujourd’hui encore, elle reste une figure emblématique de la culture yéménite.

De par son climat hostile, majoritairement semi-aride sur les zones de basse altitude et tropical sur les hauteurs, l’agriculture y est compliquée, si bien que l’économie de l’île repose essentiellement sur la pêche et l’élevage de bovins et de chèvres. Les habitants et leur mode de vie simple font de leurs îles un endroit incroyablement préservé, au niveau de conservation sans égal, où les hommes vivent en osmose avec leur environnement et lui vouent un respect olympien. 

Situé à la sortie du golfe d’Aden se jetant dans la mer d’Arabie, c’est aussi un emplacement stratégique pour le commerce et les échanges maritimes depuis l’Antiquité. Préservé des conflits géopolitiques de la région comme la guerre civile sévissant au Yémen continental, l’archipel ne reste pas moins un point névralgique convoité du Moyen-Orient, notamment par les Emirats Arabes Unis. Plusieurs opérations ont été menées par la communauté internationale pour militariser et protéger la zone, comme l’Ocean Shield de l’OTAN ou l’opération Atalante de l’Union Européenne.

A picture containing water, sky, outdoor, nature

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Socotra old sea port | Valerian Guillot | Flickr

Critères de sélection 

L’Archipel de Socotra a été classé patrimoine mondial de l’UNESCO en 2008 selon le critère suivant :

Critère (x) : « contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation ».

Considérée comme une véritable Arche de Noé, Socotra se démarque par le nombre incommensurable d’espèces endémiques qu’elle abrite. C’est aussi un des endroits les mieux conservés de la planète, bien que peuplé. Son isolement géographique la coupant de tout, une faune et une flore incroyable s’y est développée, abritée des regards, mais somme toute, fragile. L’archipel est classé comme point chaud de la biodiversité de la corne d’Afrique (ou Hotspot), c’est-à-dire comme zone biogéographique sensible et menacée qui regroupe un grand nombre d’espèces endémiques.

En effet, 37% de la flore, 90% des espèces de reptiles et 95% des espèces d’escargots terrestres évoluant sur cette île aux merveilles n’existent nulle part ailleurs. 22 zones clefs de conservation et de transit d’oiseaux marins et terrestres y ont été recensées. 75% de la superficie émergée représentent des sanctuaires naturels.

Enfin, en cette décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques, mettons à l’honneur la vie marine fabuleuse de Socotra et ses sanctuaires marins, regroupant 253 espèces de coraux constructeurs de récifs, indispensables pour la santé de nos océans, 730 espèces de poissons côtiers et 300 espèces de crabes, crevettes et langoustes dans les eaux turquoises de ses lagons vierges. 

Gestion de l’île

Aujourd’hui, la priorité est de protéger l’archipel de l’exploitation humaine et de la dégradation. Pour l’heure, l’île fabuleuse sous protection juridique a su garder son intégrité et ses ressources quasiment intactes, mais les Nations Unies veulent renforcer les législations pour en assurer la pérennité et évincer les menaces futures. Le tourisme non durable est également une menace pour l’île, bien que les moyens de rejoindre Socotra soient restreints, rendant sa fréquentation difficile. 

L’archipel bénéficie de plusieurs titres et programmes de protection.

Il figure sur la liste Global 200 du World wide Fund for Nature (anciennement WWF World Wildlife Fund), regroupant les 238 régions écologiques les plus représentatives de la biodiversité sur Terre, ou encore au programme marin de l’UNESCO, visant entre autre à évaluer les impacts du réchauffement climatique sur le patrimoine mondial marin et de suivre leur état de conservation.

➯Lecture annexée: Peut-on encore sauver Socotra, l’archipel yéménite du « sang-dragon » ? | National Geographic

sources: Archipel de Socotra – UNESCO World Heritage Centre, Socotra — Wikipédia (wikipedia.org)

Cet article n’engage que son auteure.

Léane YVOREL

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[Chronique scientifique, le patrimoine mondial naturel de l’UNESCO : le parc national des Everglades]

Le 25 février 2021, l’UNESCO a publié une évaluation scientifique sur le rôle essentiel des sites marins du Patrimoine mondial, expliquant que le stockage de carbone du patrimoine mondial marin permettait en effet de conserver des milliards de tonnes de CO2 hors de l’atmosphère.

A cette occasion, nous avons décidé de vous présenter le parc national des Everglades aux Etats-Unis, qui abrite un des plus grands écosystèmes marins du monde mais qui est aujourd’hui menacé.

Présentation du parc national des Everglades :

Ce parc de 567 017 hectares, qui se situe à la pointe sud de la Floride, englobe 25% de la région marécageuse des Everglades et est la plus grande réserve de nature sauvage subtropicale du continent. Il a été déclaré réserve de biosphère en 1976, avant d’être inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1979 et de devenir une zone humide d’importance internationale en 1987.

Le parc national des Everglades a vu le jour dans le but de protéger la région. En effet, depuis que celle-ci a commencé à être cultivée et urbanisée au XIXe siècle, ses écosystèmes ont souffert de l’activité humaine et de l’utilisation du cours du lac Okeechobee, qui alimentait à l’origine les marécages.

On retrouve plus de 740 espèces d’oiseaux, de mammifères, de poissons et reptiles dans le parc, dont 36 espèces menacées telles que le lamantin des Caraïbes ou le crocodile américain.

Critères de sélection :

Pour être inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, un site doit répondre à au moins un des dix critères de sélection. Le parc national des Everglades en satisfait trois.

Critère (viii) : « être des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l’histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d’éléments géomorphiques ou physiographiques ayant une grande signification ».

Le lit marin du parc a été englouti à la fin de la première période glaciaire et son substrat calcaire est l’une des zones de sédimentation carbonatée les plus actives du moment.

Critère (ix) : « être des exemples éminemment représentatifs de processus écologiques et biologiques en cours dans l’évolution et le développement des écosystèmes et communautés de plantes et d’animaux terrestres, aquatiques, côtiers et marins ».

Le parc présente des écosystèmes d’une diversité unique aux Etats-Unis : zones humides subtropicales, marais d’eau douce, feuillus tropicaux, pins, forêts de mangroves, marais salants et algues marines. La chaîne alimentaire est également ininterrompue et on y trouve de nombreux prédateurs comme l’alligator, le crocodile ou la panthère de Floride.

Critère (x) : « contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation ».

Grâce à la variété de ses habitats aquatiques, le parc est devenu le refuge de nombreux animaux, dont une vingtaine d’espèces rares, menacées et en péril. Il est également vital pour la reproduction de 400 espèces aviaires et forme un couloir de migration.

Gestion du parc :

Le Parc national des Everglades est géré en vertu de la Loi organique de 1916, qui a établi le Service des parcs nationaux aux Etats-Unis. Des lois fédérales complètent l’orientation générale du Congrès afin de protéger le parc et ses ressources.

Des partenariats sont mis en place avec différentes autorités comme la South Florida Ecosystem Restoration Task Force ou l’Everglades Coalition, qui sensibilise à la protection de l’environnement.

Le parc a été réinscrit sur la liste du patrimoine mondial en péril à la demande des Etats-Unis en 2010, car l’expansion agricole, le drainage, les incendies, la pollution de l’air et de l’eau perturbent les espèces végétales et animales présentes. Les mesures de gestion insistent donc principalement sur la mise en œuvre de projets de restauration des flux et d’amélioration de la qualité de l’eau.

Sources : https://fr.unesco.org/news/nouvelles-recherches-mettent-evidence-role-essentiel-sites-marins-du-patrimoine-mondial-lutte, https://whc.unesco.org/fr/list/76/ 

Cet article n’engage que son auteure.

Écrit par Mathilde VARBOKI.

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[ Chronique scientifique, le patrimoine mondial naturel de l’UNESCO : Réseau des lacs du Kenya dans la vallée du Grand Rift ]

Classé en 2011 au patrimoine naturel mondial de l’Unesco, le réseau des lacs du Kenya
dans la vallée du Grand Rift regroupe trois lacs interconnectés : le Lac Bogoria, le Lac Nakuru et le Lac Elementaita ainsi que les territoires les entourant. Le site s’inscrit plus largement dans une succession de lacs traversant la vallée du Grand Rift (Ethiopie, Tanzanie, Kenya…), et orientés dans le sens nord-sud. Le réseau des lacs du Kenya dans la vallée du Grand Rift s’étend sur 32034 hectares. La vallée du Grand Rift correspond à un ensemble géologique situé en Afrique de l’Est et constitué d’une série de volcans et de failles. Son paysage particulier a été façonné par une succession d’épisodes tectoniques et volcaniques.
Les lacs, peu profonds, hébergent une riche biodiversité parfois menacée. Le site abrite
une grande diversité et concentration d’espèces d’oiseaux, notamment des flamants nains et des
pélicans blancs.

Lac Elementaita


Critères de sélection * :


Critère VII : « représenter des phénomènes naturels ou des aires d’une beauté naturelle et d’une
importance esthétique exceptionnelle ».
Le site présente une beauté naturelle exceptionnelle avec son paysage spectaculaire,
façonné par une succession d’épisodes géologiques. Il concentre également une profusion « de
chutes, de geysers, de sources chaudes, d’ eaux libres et de marais, de forêts et de pâturages
ouverts, avec pour décor le paysage de la vallée du Grand Rift » qui lui confère une richesse
naturelle. L’abondante biodiversité participe à ce cadre naturel harmonieux et la faune sauvage
offre une expérience exceptionnelle de la nature.


Critère IX : « être des exemples éminemment représentatifs de processus écologiques et
biologiques en cours dans l’évolution et le développement des écosystèmes et communautés de
plantes et d’animaux terrestres, aquatiques, côtiers et marins ».
Le site concentre des processus écologiques et biologiques importants pour l’étude de
l’évolution et du développement des écosystèmes des lacs et de leur biodiversité. Ces lacs alcalins (pH est supérieur au pH neutre qui est de 7) produisant une immense quantité de
biomasse sont aussi d’intérêt scientifique international.


Critère X : « contenir les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la
conservation in situ de la diversité biologique, y compris ceux où survivent des espèces menacées ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation ».
Le réseau des lacs du Kenya dans la vallée du Grand Rift est le plus important site de
nourrissage de la planète pour les flamants nains et le principal site de reproduction et de
nourrissage pour les pélicans blancs dans la vallée du Grand Rift. Jusqu’à 4 millions de flamants
nains se déplacent entre les trois lacs la majeure partie de l’année. Le site participe à la
conservation de ces espèces et fait partie intégrante de « la route la plus importante sur la voie de migration Afrique-Eurasie, où des milliards d’oiseaux voyagent entre leurs sites de reproduction du nord et leurs sites d’hivernage d’Afrique » Il abrite par ailleurs de nombreux mammifères à l’image du rhinocéros noir, de la girafe de Rothschild ou encore du grand koudou.

*Pour figurer sur la Liste du patrimoine mondial, les sites doivent avoir une valeur universelle exceptionnelle et satisfaire à au moins un des dix critères de sélection de l’UNESCO. Pour retrouver les critères de sélection : https://whc.unesco.org/fr/criteres/


Gestion du site :


Le site classé fait face à des pressions et menaces extérieures de taille : sédimentation due à
l’érosion des sols, extraction accrue d’eau dans le bassin versant (qui augmente avec la
croissance démographique rapide de la région), expansion d’infrastructures, gestion des animaux sauvages, tourisme et pollution venue de la ville de Nakuru….
Chacun des trois lacs bénéficie « d’une protection juridique, de plans de gestion actualisés et
d’une présence satisfaisante pour appliquer les dispositions de gestion sur le terrain ». Les trois
lacs constituant le site classé sont par exemple inscrits sur la liste de Ramsar*.
La coopération transfrontalière est par ailleurs nécessaire pour la protection du bien puisque son fonctionnement (écosystèmes….) dépend en partie de la protection d’autres régions lacustres et de zones humides accueillant les espèces migratrices.

*La Convention de Ramsar, est relative aux zones humides d’importance internationale ( habitats des oiseaux d’eau…). Il s’agit d’un traité intergouvernemental adopté le 2 février 1971 qui sert de cadre à la conservation et à l’utilisation rationnelle des zones humides et de leurs ressources.

Lesser Pink Flamingoes Phoenicopterus minor at Lake Nakuru Kenya East Africa

Lac Nakuru, Kenya. Image libre de droits.


Site : https://whc.unesco.org/fr/list/1060


Cet article n’engage que son auteure.
Ecrit par Agathe Passerat de La Chapelle.

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[Les grands travaux de l’UNESCO : La campagne de Nubie, 1960-1980]

La campagne dite de Nubie trouve sa source dans le dilemme qui oppose la culture au développement de l’Égypte alors nommée République Arabe Unie. Le gouvernement prend la décision à la fin des années 1950 de bâtir le haut barrage d’Assouan et d’ainsi créer le lac Nasser (lac de Nubie), réservoir d’eau de 162 milliards de mètres cubes devenu nécessaire pour le développement de la région et du pays. Cependant un tel projet mettrait en péril quelque 17 sites archéologiques égyptiens et 5 autres en territoire soudanais, tous sur les bords du Nil et en amont du barrage. 

    C’est pourquoi en 1959 les gouvernements égyptiens et soudanais font appel à l’UNESCO indépendamment l’un de l’autre, demandant assistance pour sauver ces sites archéologiques nubiens voués à la submersion en l’absence d’action. À la fin de cette même année, la 55e session du conseil exécutif de l’UNESCO adopte le principe d’un appel à la coopération internationale dans l’objectif de sauver les sites en danger. Des études et recherches archéologiques débutent alors en urgence. 

    En janvier 1960 les travaux pour le haut barrage d’Assouan commencent, c’est le début du compte à rebours. Le 8 mars de la même année (1960) Vittorino Veronese alors directeur général de l’UNESCO lance un appel à la communauté internationale pour la sauvegarde de ce qui commence à un être perçu comme un patrimoine appartenant à l’humanité. 

    S’ensuivent 20 ans de travaux pharaoniques pour démonter pierre par pierre ces monuments de l’Égypte antique vieux de plus de 4 millénaires pour la plupart. Ces monuments sont ensuite rebâtis en 6 groupes, à l’abri des eaux du Nil et du futur Lac Nasser : 

  • les temples des îles de Philae sur l’île d’Agilkia à proximité du précédent barrage d’Assouan ; 
  • les temples de Beit el Wali et Kalabsha et le Kiosque de Qertassi sont positionnés près du haut barrage ;
  • les temples de Dakka, Maharraqa et Wadi es Sebua près du site antérieur de Wadi es Sebua ;
  • les temples d’Amada et Derr ainsi que la tombe de Pennut à Aniba près du site antérieur d’Amada ;
  • les temples d’Abu Simbel in situ mais 60 m au-dessus du site d’origine ;
  • les temples d’Aksha, Buhen, Semna Est et Semna Ouest au jardin-musée de Khartoum.
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/fb/Abusimbel.jpg
Démontage des statues du temple d’Abu Simbel

    Toutefois 3 monuments ne purent être déplacés et totalement sauvés (le temple de Gerf Husein, les chapelles de Qasr Ibrim et le temple d’Abu Oda), 4 autres temples furent offerts en guise de gratitude à certains pays ayant contribué au succès de la campagne. Ainsi le temple Debod fut offert à l’Espagne, le temple Taffa aux Pays-Bas, le temple Dendur aux États-Unis d’Amérique et celui d’Ellesyia en Italie. 

    Une des opérations les plus spectaculaires fut celle du sauvetage d’Abu Simbel. Ce site archéologique redécouvert au 19e siècle et initialement situé à 280 km d’Assouan abritait 2 temples creusés dans le roc. Un premier était dédié à Ramsès II et un second à la grande épouse Néfertari. C’est en novembre 1963 qu’est signé l’accord pour le sauvetage du site et en avril 1964 que commencent les travaux. Il faut dans un premier temps décaper la montagne pour soulager le poids qui repose sur les temples encastrés dans la roche. La difficulté du site réside dans le fait que celui-ci n’a pas été construit pierre par pierre comme les autres, il ne peut donc pas être démonté, il doit être découpé. C’est le début de mois de travaux où les parois et géants monolithiques de grès sont sciés puis déplacés quelques 60 km plus loin. Là-bas, sur une colline artificielle, une montagne en béton reproduisant celle d’origine attend les décors du temple.

    La campagne de Nubie prend officiellement fin le 10 mars 1980, 20 ans exactement après l’appel de Vittorino Veronese. Il s’agit là du premier grand chantier international de sauvegarde pour des monuments qui font désormais partie du patrimoine mondial de l’humanité. 


Article de Yacine Navenot

Cet article n’engage que son autrice.

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